10.Introspection
Je suis porté à l’introspection : j’aime comprendre comment je vis ce que je vis et ne rien me cacher de moi-même. Si je le pouvais, je m’allongerais sans cesse sur mon propre divan pour m’écouter parler de ce qui m’a fait ce que je suis. Non que je me considère comme l’être le plus intéressant de la terre, non que je pense découvrir en moi des secrets ignobles profondément enfouis, mais parce que j’éprouve un besoin absolu de savoir et ne supporte que très mal de subir ma vie plutôt que de la diriger. Fantasme de puissance ? Je ne crois pas car je n’ai jamais cherché ni les honneurs ni le pouvoir et si j’ai été mêlé à quelques événements historiques, c’est malgré moi parce que, par ma naissance dans une famille d’artistes, j’ai dû fréquenter des milieux de pouvoir et, parce que, mon amour des femmes m’a conduit à nager en des eaux où je n’aurais jamais dû me trouver. Être l’amant d’Oriane, la femme du Général Proust, m’a ainsi mis dans des situations historiques que j’aurais plutôt aimé fuir. C’est ainsi !
Mais si, comme tout le monde, je n’ai pas choisi le destin qui nous fait toujours malgré nous, je n’ai jamais renoncé à comprendre ni son pourquoi ni son comment. Emporté par les flots tumultueux d’un fleuve en furie, je chercherai toujours à comprendre les mouvements erratiques qui me pousseraient de rocher en rocher ou me feraient tourbillonner sur place…
Pourtant il y a encore quantité de mes actes que je ne comprends pas. Ainsi ce blog… Je ne parviens pas à comprendre d’où vient ce besoin qui, de temps en temps, m’oblige d’une part à rédiger un journal et, d’autre part, à le déposer dans les pages virtuelles d’un instrument de communication des plus théoriques. Bien que médecin généraliste en retraite, je ne suis pas plus techniquement stupide que la plupart de mes contemporains : je n’ignore pas que les textes que je dépose ici sont des bouteilles à la mer dont la plupart iront se perdre dans les amas de détritus que les marées déposent, s’enliseront dans les sables de côtes désertiques ou se fracasseront sur des rochers de côtes inaccessibles. Et je n’ai plus seize ans : je ne crois plus aux récits romanesques où des messages envoyés sur les flots font découvrir des trésors ou sauvent des naufragés… Alors ? Pourquoi cela ? D’où vient ce besoin d’écrire, plus encore ce besoin de croire publier ce que j’écris ? Exhibitionnisme ? Certainement pas puisque personne ne les voit… Masochisme ? peut-être : je chercherais une satisfaction à produire un travail que, d’avance, je sais inutile !… Est-ce si différent que d’envoyer, par la poste, un manuscrit à une quelconque maison d’édition ? Esprit moutonnier : faire comme ces millions de mes contemporains qui déversent sur Internet une vomissure de textes qu’heureusement personne, à part eux-mêmes, ne lit jamais.
Peut-être, au fond des choses, je ne fais tout cela que pour essayer de comprendre pourquoi je le fais et que je ne serai guéri de cette graphomanie compulsive que lorsque j’aurais compris. En quelque sorte le symptôme de la maladie serait dans l’acceptation de la maladie elle-même. Il y a tant de pistes qui se perdent dans la jungle de l’esprit humain…
Si j’avais la réponse ?
Commentaires
Enregistrer un commentaire